Nautix, toutes voiles dehors pour relocaliser sa production
Nautix fait partie de la dizaine d’entreprises volontaires pour participer à l’expérimentation menée par Bretagne Développement Innovation (BDI) sur la relocalisation par les achats. Basée à Guidel (Morbihan), elle décline ses activités dans l’injection plastique et la fabrication de peintures marines et d’équipements pour la planche à voile. C’est par cette dernière que la société a amorcé son virage vers la relocalisation avec la fabrication de mâts en composite. Entretien avec Maxime Delbury, co-dirigeant de Nautix.
Une activité historique relocalisée
Évoquer Nautix dans le microcosme du nautisme breton, c’est évoquer une référence. Depuis 1980, l’entreprise basée à Guidel (Morbihan) s’est forgé une solide réputation dans la fabrication d’équipements nautiques. Historiquement, c’est le domaine de la planche à voile qui porte l’entreprise avec la production de mâts et d’accessoires, autour des métiers de l’injection plastique et de la transformation d’aluminium.
Les aléas de la vie d’entreprise et notamment la compétitivité des concurrents étrangers l’ont poussée à élargir son champ d’action. « Pour l’activité historique, liée à la planche à voile, nous avons longtemps résisté pour la partie composite quand l’essentiel de la fabrication est parti en Asie dans les années 1990. Nous avons baissé les bras sur ce segment autour de 2010, situe Maxime Delbury. Mais nous défendons toujours la localisation. Nous fabriquons toujours, dans nos locaux, les pièces d’accastillage, comme les wishbones ou les pieds de mâts. En parallèle, depuis les années 2000, nous nous sommes spécialisés dans les peintures marines et l’antifouling pour la navigation plaisancière. »
Cependant, depuis 2020, Nautix mène une politique de relocalisation pour produire, de nouveau, des mâts en composite.
Une méthode à réapprendre
Parti pour mieux revenir, le composite ? On peut le penser. Pour ramener cette activité dans son sillage, Nautix a bénéficié d’un accompagnement de la Région Bretagne. « Nous avons monté un projet collaboratif avec les entreprises Fiiish (Guipavas), le laboratoire IRDL de l’université de Bretagne Sud et l’Institut Régional des Matériaux Avancés (IRMA) à Lorient. Ce projet est en train d’aboutir et fin 2023, nous serons en mesure de proposer des mâts en composite haut de gamme. »
L’entreprise a également dû revoir ses processus de fabrication. Cela est notamment passé par de l’investissement dans la robotisation. « Ce robot nous permet de gommer notre désavantage inhérent au coût de la main d’œuvre. » Ce passage à la robotique s’est accompagné d’un apprentissage pour produire différemment. « Nous sommes passés du manuel à l’automatique. La courbe d’apprentissage a duré deux ans environ. L’automatisation nous permet d’être agiles et de pouvoir répondre rapidement à des clients qui demandent du sur-mesure. Le mode de distribution est aussi sujet à questionnement. Nous ne pourrons pas rester calés sur le schéma classique des distributeurs européens achetant des containers en Asie et les revendant à des magasins spécialisés. Il faudra sans doute vendre en direct. »
L’entreprise a également recruté. Local, toujours. « Nous avons créé un emploi qualifié entièrement consacré à projet. Un ingénieur issu de l’Université Bretagne Sud nous a rejoints. Nous escomptons créer 3 ou 4 emplois qualifiés de production sur cette activité précise, à terme. »
Une expérimentation pour « bousculer les certitudes »
Pour prolonger ce retour à la relocalisation, Nautix a intégré, depuis fin 2022, la dizaine d’entreprises volontaires à une expérimentation d’accompagnement pour la relocalisation par les achats menée par BDI. « Cela nous a semblé assez naturel de nous joindre à cette étude. La première relocalisation est celle que l’on ne délocalise pas. Depuis le début, nous nous battons pour garder notre production en Bretagne. L’action de BDI nous a paru cohérente avec notre stratégie », justifie Maxime Delbury.
L’expérimentation n’en est pour l’instant qu’à ses prémices, avec l’apport de données chiffrées de la part des entreprises volontaires, mais suscite de grandes attentes. « L’approche est plus analytique que la nôtre, qui reste plus qualitative et intuitive. Nous nous attendons donc à être bousculés dans nos habitudes pour identifier de nouveaux articles relocalisables que l’on n’avait pas soupçonnés. »
À l’avenir, se réunir pour relocaliser d’autres pièces et relancer une filière ?
Détecter des produits à relocaliser pour relancer une filière en Bretagne ? Maxime Delbury y croit. Notamment pour la conception de petites voiles. « La Bretagne compte de nombreuses voileries. Mais ils regardent plus vers la croisière et les voiles de course. Nous sommes nombreux à en avoir besoin de petites voiles pour nos disciplines et elles sont toutes fabriquées à l’étranger. Il serait intéressant d’utiliser cette étude chiffrée et factuelle pour convaincre autour de nous et essayer de mutualiser nos efforts. »
Crédit photo de couverture : ©RAFASOULART
